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UN PRESIDENT NOUS SUFFIT !

(07-04-2006)

C’est ce 4 avril, anniversaire de l’indépendance de notre nation, date ô combien symbolique et particulière que notre Idy national a choisi pour s’adresser à la nation. Son coup a pour le moins fonctionné, au-delà même de toute espérance. Le lendemain, il fit la une de la quasi-totalité des quotidiens. C’est sûr que l’ancien consultant en communication politique sait y faire en manipulation des médias ou alors ces derniers le servent fort bien.
En effet, l’on peut légitimement se demander ce qu’une déclaration d’Idrissa Seck a de si spécial ? L’importance qu’il se donne et qui lui est conférée est-elle vraiment méritée ? Permettez-moi d’en douter.
Les journaux et les bulletins d’information des radios (vu que la télé est la propriété privée de Wade) n’ont cessé de faire allusion à la sortie imminente d’un CD, le troisième de la série, nous tenant en haleine, nous faisant attendre le cœur battant et la curiosité émoustillée le « deus ex machina ».
Après avoir volé la vedette à tous les imams, ce vendredi où il nous servit son « khoutba » (sermon) « LUI ET MOI », il semble avoir voulu nous prouver qu’il pouvait aussi la ravir au chef de l’État, président de tous les Sénégalais. Etait-ce pour mesurer sa côte de popularité ou dans la mégalomanie et le narcissisme qui semblent le caractériser, se prend-il déjà pour celui qui dirige notre nation ? Dans une sorte de remake de fort mauvais goût de l’appel du 18 juin de De Gaulle, dans une grandiloquence à la Malraux, d’une voix vibrante rappelant les tribuns fascistes qui se prenaient pour des sauveurs, Monsieur Seck a souligné les difficultés que subit le peuple, comme s’il n’avait pas contribué à les créer, lui, l’ex bras droit de Wade, l’ancien homme fort du pays. Il a annoncé sa candidature qui ne nous a point surpris. Il est évident que depuis des années, il n’a qu’un seul but : le pouvoir. Ne dit-il pas lui-même qu’être second ne l’intéresse pas, lui « born to be president » (né pour être président.) Il n’y est pas arrivé sous Wade, donc il veut passer par l’opposition, lui qui, pendant quatre ans, l’a combattue, sans relâche, sans répit, sans vergogne.
Le peuple, lui, ne se pose qu’une question, la seule qui vaille : « Où sont passés les milliards ? » Et jusqu’ici Idy, qui se veut quatrième président, évite d’y répondre. Dans son discours en wolof, il déclare avoir une solution aux problèmes du pays, mais c’est dans le futur qu’il annonce ne pas s’attendre à un salaire autre que celui que Dieu lui accordera. En gros, il n’a pas dit « je n’ai pas volé », mais « je ne volerai pas. » Idy, avouez que ce n’est pas clair du tout.
Et comme si cela ne suffisait pas, il veut nous faire croire que Wade prétend l’avoir créé de même que Dieu a créé Adam. Idy, notre cher Idy national, même les détracteurs les plus féroces de Buur Saalum savent qu’il a juste voulu dire qu’il vous a formé, ce que vous ne saurez nier. C’est une bassesse et la preuve d’une mauvaise foi flagrante de chercher à le traduire autrement. Donc trouvez autre chose pour le descendre. Ce coup bas est condamné par l’arbitre qu’est le peuple qui veut juste savoir où sont passés ses milliards et espère que la justice fera son travail.
Dans son discours en français, qui est complètement différent de celui en wolof, Idy, le « Messie », dit avoir un projet de redressement national, s’imaginant que les Sénégalais porteront leur choix sur lui et demandant à l’opposition patriotique de se ranger derrière lui. Il dit aussi qu’il n’y a pas eu de deal avec Wade pour sa sortie de taule, mais rien de clair sur les milliards.
On se souvient de Mara déclarant : « Je ne me présenterai jamais contre Wade. » En voilà une manière de tenir sa parole. Qui peut encore faire confiance à un tel homme qui dit et se dédit sans ciller ? Tout comme me direz-vous, qui peut encore faire confiance à Wade qui avait promis de ne jamais lui faire de mal ?
En tout cas, l’opposition n’a pas attendu Idrissa Seck pour se rassembler. Et, « en vérité, en vérité, je vous le dis », si demain Wade lui dit « Reviens au Pds, ta famille naturelle, et tu seras candidat à ma place », Idy tournera le dos à l’opposition qu’il matera une fois au pouvoir. Sous Wade la tortuosité n’est plus une tare, elle est un art. Idy, le disciple, semble avoir bien compris les leçons du maître. Qu’on se le tienne pour dit !

Bathie Ngoye Thiam


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