(05-02-2005)
A chaque fois que le « Dakar » commence, certaines personnes
comme moi ne se demandent pas qui seront les vainqueurs, mais qui seront les
morts. Ce « sport » a pris, au cours de ses vingt-six années
d’existence, des allures d’arène pour gladiateurs. Quiconque
y participe, sait qu’il risque de tuer ou d’être tué.
S’il n’y avait que les concurrents qui mouraient, on pourrait
dire qu’ils ont le droit de jouer avec leurs vies, mais beaucoup d’innocents
y « perdent leurs nez », fauchés par les bolides qui traversent
leurs villages à tombeau ouvert. Et moi qui croyais que tout conducteur
qui roule à une certaine vitesse dans un lieu d’habitation commet
une infraction ! Ce n’est que l’an dernier, paraît-il qu’on
a commencé à limiter les vitesses dans les villages. Avant,
ils roulaient comme ils voulaient et tuaient « accidentellement »
sans encourir de lourdes peines.
Thierry Sabine, l’initiateur de cette course, en 1978, est lui-même
décédé en 1986, son hélicoptère ayant heurté
une dune. Parmi les cinq victimes de ce crash, il y avait le chanteur Daniel
Balavoine, auteur de « L’Aziza » qui fut un succès
posthume. Depuis, le « Dakar » n’a cessé de compter
ses morts. Il est donc temps de se demander si le jeu en vaut la chandelle.
On voulait de l’exotisme et du rêve, mais le cauchemar est devenu
l’hôte de marque.
Aujourd’hui, les véhicules roulent plus vite et les risques n’en
sont que plus grands. Les organisateurs devraient prendre les mesures adéquates
si cela est encore possible. Ce n’est sûrement pas pour rien qu’on
parle des « fous du désert ».
Je me demande vraiment à qui profite le « Dakar ». Qu’est-ce
qu’on y gagne ? Si au moins ils élargissaient et goudronnaient
nos routes ou payaient pour traverser nos villages ou que sais-je encore…
Vu que nous ne pouvons pas arrêter ce sport macabre, espérons
qu’un jour, notre Syndièly nationale, fille de notre cher Président,
nous rapportera un trophée, en attendant que nos autorités compétentes
(Sport, Tourisme, Culture) trouvent le moyen de faire bénéficier
le peuple sénégalais de cette grande publicité qu’est
le « Dakar ». D’ici là, nous n’avons qu’à
nous contenter des déclarations du ministre des Sports : « …Syndiély
Wade. C’est une dame qu’on doit donner en exemple à la
jeunesse africaine et sénégalaise ; c’est un symbole qu’on
doit offrir à la jeunesse. C’est la plus grosse satisfaction
pour nous dans cette 27e édition. » A défaut de retombées
économiques, et malgré les vies humaines perdues, nous avons
au moins un nouveau symbole continental qu'on a cessé de nous montrer
à la télé. Une star est née ! Vive donc le «
Dakar » !
Bathie Ngoye Thiam