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LE « RETOUR » DE BEN LADEN

Bush vient de jouer sa dernière carte, carte qu’il comptait sans doute réserver à l’Iran, sa probable prochaine cible : Ben Laden ! Il nous l’a ressorti « vivant » et plus dangereux que jamais. (La CIA accuse déjà l'Irak et l'Iran d'héberger des terroristes liés à Oussama ben Laden, pendant qu’on tente de négocier avec la Corée du Nord et qu’on ferme les yeux sur ce que font des pays comme Israël.)
La carte Ben Laden pourrait être un atout pour la réélection de Bush. Imaginez qu’en pleine campagne électorale il révèle la capture de Ben Laden et commence un interminable procès. Pas de chance ! Il doit, maintenant ramener Ben laden au devant de la scène. On nous diffuse alors une cassette audio…
Les « preuves » de Powell n’ont convaincu personne. Tout le monde doute de la démonstration de Colin Powell qui de son côté affirme avoir de nouvelles « preuves » sur les liens entre l’Irak et l’organisation de Ben Laden, qu’il nous présentera prochainement.
La France et l’Allemagne sont « contre » cette guerre injustifiable. La Russie partage leur position et la Chine vient les rejoindre. L’Amérique accuse alors la France de défendre ses intérêts pétroliers en Irak. Il ne manquait plus que ça ! Qui n’est pas intéressé par le pétrole ?
Le monde tout entier s’oppose à cette guerre annoncée. Dans la plupart des pays, des manifestions sont organisées pour dire « non ».
Bush a tenté, il n’y a pas longtemps de cela, de faire d’une pierre deux coups en proposant à l’OTAN de défendre la Turquie en cas d’attaque irakienne. Or, nous pensons bien que quand les bombes pleuvront sur Bagdad, Saddam Hussein aura sûrement d’autres préoccupations que d’envoyer des missiles à la Turquie. (Rappelons que lors de la « guerre propre » du Golf, le peuple irakien avait reçu plus de bombes que l’Allemagne nazie lors de la seconde guerre. Ça fait très propre en effet. Et celle à venir sera encore plus propre.)
Si l’OTAN avait dit oui, cela aurait d’une part signifié que l’Europe est d’accord pour l’invasion de l’Irak et d’autre part mettrait un pied de la Turquie dans la communauté européenne. La France et la Belgique se servent de leurs droits de veto et l’Allemagne les soutient. (Hélas pas pour longtemps. Bush a court-circuité Chirac.)
On sait que la Turquie, pays dit musulman, a laissé les Américains se servir de son sol pour frapper l’Irak, dans l’espoir que Washington fasse pression sur le communauté européenne pour qu’elle y soit admise, mais aussi pour recevoir une aide financière. Le dollar achète tout, même l’honneur et la foi.
Quand Bush envahissait l’Afghanistan, il s’était servi de Ben Laden pour avoir le soutien de son peuple et celui de la communauté dite internationale. Donc il tente de jouer la même carte mais, cette fois-ci, personne n’est dupe. C’est à lui qu’il faut dire : « The game is over. » (La partie est terminée.)
N’est-ce pas étonnant que ce soit Ben Laden, « l’ennemi juré des États-Unis », Ben Laden, « si doué en stratégie », qui apporte de l’eau au moulin de Bush en si mauvaise posture ? Pourquoi Ben Laden viendrait-il fournir la « preuve » que Bush cherche désespérément ? Pour M. Powell, le chef d’Al-Qaida affirme, dans cette « déclaration », son "partenariat avec l'Irak".
On se souvient de la dernière cassette audio attribuée par Washington à Ben Laden. Des informaticiens suisses avaient démontré que ce n’était pas la voix du Saoudien. L’affaire fut étouffée. Quand Ben Laden était actif, il envoyait des cassettes vidéo et non audio.
Pour en revenir au denier « message », les journaux nous disent qu’« Avant même la diffusion du message par Al-Jezira, le secrétaire d'Etat Colin Powell avait affirmé en avoir eu connaissance et accusé Ben Laden d'être «en partenariat avec l'Irak». On a le droit de se demander comment. « Ce nouveau message prouve que Ben Laden soutient l'Irak, a répété le porte-parole du département d'Etat, Richard Boucher. » Et le journal « Le Monde » nous apprend que « de hauts responsables américains ont cherché à exploiter le plus rapidement possible ce document sonore, indiquant qu'il portait très certainement la voix de Ben Laden… »
Décortiquons ce soi-disant message de Ben Laden.
On nous dit que le « terroriste » « exhorte les musulmans à conjuguer leurs efforts pour défendre le peuple irakien. » Bush cherche ainsi à dresser les chrétiens contre les musulmans pour commencer sa croisière car, jusqu’à ce jour, le Pape et les Églises sont dans le camp pacifiste. En clair, voici le message : « Les musulmans veulent nous tuer donc nous devons nous défendre. » Dommage que les médias ne disent pas assez que Saddam Hussein a beau être un dictateur (comme tant d’autres qu’on laisse tranquille), il n’en demeure pas moins un laïque ; le deuxième homme fort de Bagdad, Tarek Aziz, est un chrétien.
En même temps on fait dire à Ben Laden que « Les socialistes (allusion au parti Baas au pouvoir à Bagdad) ont perdu, il y a longtemps leur crédibilité, et sont des infidèles où qu'ils soient, à Bagdad comme à Aden. » N’est-ce pas contradictoire ? Bush cherche ainsi à faire croire aux potentiels sympathisants de Ben Laden en Irak, que leur « chef » leur ordonne de ne pas soutenir Saddam Hussein.
Bush et sa bande ont plus que jamais besoin d’affoler leurs peuples pour avoir leur soutien. C’est un terrorisme psychologique.
Le directeur du F.B.I. déclare : « Nos enquêtes suggèrent qu'Al-Qaida a développé une infrastructure de soutien à l'intérieur des Etats-Unis qui permet au réseau de préparer un autre attentat contre le territoire américain. »
« Le patron de la CIA a expliqué que les Etats-Unis avaient décidé de rehausser, dès la fin de semaine dernière, leur niveau d'alerte face aux menaces afin d'avoir plus de temps pour intervenir contre les terroristes. Vendredi 7 février, le niveau d'alerte était passé d'"élevé" à "très élevé", le deuxième dans l'échelle établie en mars par les Etats-Unis, entraînant un vaste renforcement des mesures de sécurité à travers les Etats-Unis et un appel à la vigilance des Américains. »
Mais la meilleur nous vient d’Angleterre où Blair, devenant de plus en plus impopulaire, même au sein de son parti, a carrément sorti des chars de combat. Le peuple se sent alors en danger et soutient toute action censée le protéger. « C'est une alerte qui concerne l'ensemble de Londres. (…)", a déclaré sir John Stevens, le chef de Scotland Yard, sur la chaîne de télévision ITV. "Nous ne ferions pas cela si ce n'était pas nécessaire. C'est nécessaire pour la sécurité des Londoniens et des gens qui visitent la capitale. » Et pour maintenir l’inquiétude et la terreur, la radio BBC nous apprend quelques jours plus tard, comme on pouvait s’y attendre, que la brigade anti-terroriste interrogeait six personnes arrêtées près des aéroports, mais ne pouvait pas en dire plus. Avec le retour des pèlerins de la Mecque, les arrestations de « suspects » se multiplient à outrance et alimentent la psychose. Dans certains quartiers de Londres, on se croirait aux territoires occupés de la Palestine. A chaque coin de rue, des soldats armés jusqu’aux dents. Mais, « en vérité, en vérité, je vous le dis », seuls des ennemis de l’Irak feraient des attentats qui justifieraient une attaque américaine. Je me demande vraiment où est « l’axe du mal ».
Au prochain épisode, on aura peut-être une photo-montage de Saddam Hussein et Ben Laden, main dans la main. Ça, ce sera une « preuve » !
Wassalam !

Bathie Ngoye Thiam.


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