ROYAL AIR MAROC : LA HANTISE DES PASSAGERS
(Wal Fadjri, 20 avril 2009)
D’un pays, le passant ne garde souvent que l’image qu’en donnent ses citoyens, image conforme à leur hospitalité, leur courtoisie, ou alors à leur mesquinerie. Du Maroc, je ne retiens hélas, et je crois ne pas être le seul, que la dernière. Ceux qui prennent Royal Air Maroc pour se rendre à Dakar, transitent généralement par Casablanca. Rares sont les vols directs. Il faut presque toujours changer d’avion à Casa. A croire qu’ils ont des appareils aux qualités douteuses pour l’Afrique et d’autres qui répondent aux normes pour l’Europe et l’Amérique.
La durée des escales varie d’une à plus de douze heures. Les passagers doivent rester dans l’aérogare, fatigués, prenant leur mal en patience. Ce n’est pas seulement au Maroc que cela se fait. Il faut juste attendre.
Une particularité de l’aéroport Mohammed V de Casablanca est qu’il y a des adolescents, qui, de toute évidence, ne vont nulle part, mais vadrouillent dans l’espace réservé aux voyageurs munis de billets. Oui, il y a des commerces dans cette zone. Y travaillent-ils ? Je ne le crois pas. Frais comme des poussins, ils approchent les gens assoupis et usent de leurs talents de pickpockets.
J’en sais quelque chose. Il y a quelques années de cela, j’étais à Casa, attendant le vol pour Dakar. Comme j’avais trois heures à glander, j’étais sur un banc, en train de lire un bouquin. Cinq ou six garçons s’installèrent sur le banc à côté. A un moment donné, l’un d’eux, me voyant m’absorbé par ma lecture, vint s’asseoir près de moi, à ma gauche, et se mit à éplucher une orange. Brusquement, il me présenta une tranche sous le nez, avec la main gauche. Cela attira mon attention, car chez nous on ne donne pas de la nourriture avec cette main. Ne pouvant refuser l’offre « désintéressée » de ce frère musulman qui voulait « soulager » un voyageur, je pris la tranche, lui dis « Soukran » (Merci) et replongeai dans ma lecture. Je ne savais pas que pendant ce temps, sa main droite était dans la poche de mon blouson. Il retourna auprès de ses acolytes qui me regardaient bizarrement, semblant se dire : « Le pauvre con, il n’a rien senti. » Le voyou avait chipé mon paquet de tabac qu’il avait sans doute pris pour un porte-monnaie. Je ne m’en aperçus que quand j’eus envie de fumer, quelques minutes plus tard. Ils s’étaient déjà évaporés. Comment peut-on laisser des larrons sévir dans un tel endroit ? Ces chenapans, sont-ils de connivence avec les agents de l’aéroport ? La question mérite d’être posée.
Un an avant cela, un copain qui avait pris le même vol que moi, via Casa, m’avait dit, le lendemain, qu’on avait dérobé ses téléphones portables. Il pensait que cela s’était fait à Dakar. Il avait une valise avec une fermeture à glissière et un cadenas. Tout le monde sait que les cadenas classiques, les filous les ouvrent en quelques secondes. Etait-ce à Dakar ou à Casa ? A Dakar, à l’arrivée, les bagagistes n’ont le pas le temps d’ouvrir les mallettes et de fouiner dedans car ils doivent les livrer immédiatement aux voyageurs.
J’avais bien avant cela remarqué qu’à chaque fois que je prenais Royal Air Maroc, ma valise était dans un lamentable état, tout le contenu sens dessus dessous. Je croyais que c’était à cause des trimballages. Mais quand je vis que même les cadeaux étaient ouverts, les emballages déchirés, je devins perplexe… Des affaires se perdaient entre le départ et l’arrivée... Eh oui ! Entre les vols des avions, il y a les vols des bagagistes.
En mars 2009, comme je devais transiter par Casa, j’avais pris mes précautions, ne mettant aucun petit objet de valeur dans ma valise. J’avais aussi relié les navettes de la fermeture Éclair par un cadenas avec un numéro secret en me disant : « Cette fois-ci, ils ne pourront pas l’ouvrir. » C’était sans compter sur leur culot. Ne pouvant composer ce numéro, ils avaient carrément sectionné les navettes. Tout montre qu’ils sont organisés et bien équipés. Seuls avec les bagages pendant des heures, ils s’octroient le droit de voler en toute tranquillité, en toute sécurité, en toute impunité, sachant que les victimes ne s’en rendront compte que quand ils seront arrivés à destination, c’est-à-dire loin du Maroc, et ne pourront rien contre eux. Mon Dieu, que c’est lâche !
Il parait que cela se fait aussi dans d’autres pays. Qui est responsable ? Les compagnies aériennes ? Les aéroports ? En tout cas, ce n’est pas drôle de se faire dépouiller de la sorte.
Qu’ils installent des caméras dans les dépôts et qu’ils fouillent les employés à leur entrée et à leur sortie ! C’est la moindre des mesures.
En attendant, je conseille à ceux qui transitent par Casablanca de prévoir des « cadeaux » pour les bagagistes.
Dommage qu’on ne puisse pas mettre des serpents venimeux dans les valises. Ha ! Ha !
Bathie Ngoye Thiam